Ukraine: les enjeux d'une troisième année de guerre


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Feb 24 2024 2 mins  

La guerre en Ukraine entre dans sa troisième année et pour Kiev le contexte n’est pas favorable. Fragilisée par le blocage de l’aide américaine, l’échec de sa contre-offensive l’été dernier et un manque croissante de munitions, l’armée ukrainienne, de l’aveu même du président Zelensky, fait face à une situation « extrêmement difficile » sur le front. Face à Moscou qui fait tourner à plein son industrie militaire et qui mobilise massivement, l’Ukraine a dû se retirer de la ville forteresse d’Avdiivka, un symbole et plaide pour un soutien accru de l’Occident. Quels sont les enjeux pour cette troisième année de guerre qui commence ?

Premier enjeu : les munitions, en particulier les plus gros obus d’artillerie, ceux de 155 mm, qui permettent de contenir la poussée de l’infanterie russe. Kiev en consomme 3000 par jour, quand les Russes en tirent 10000 : face à un tel déséquilibre Kiev joue la montre, souligne le général d’armée Grégoire de Saint Quentin (le général de Saint-Quentin a été sous-chef de l'état-major des armées chargé des opérations) : « Aujourd'hui, dans le rapport de force sur le terrain et entre les équipements, les munitions, l'Ukraine n'a pas l'avantage. Donc l'enjeu, c'est de tenir le temps que ce rapport de force puisse s'inverser. Aujourd'hui, on sait que la Russie dispose de plus de munitions, plus d'équipements. Et on voit que d'ailleurs sur le terrain son armée avance, pas beaucoup, peut-être, mais malgré tout c’est elle qui a l'initiative. L'enjeu pour les Ukrainiens, c'est donc de tenir sans consommer trop de ressources, notamment les ressources humaines.

L’arrivée des F16

Kiev attend de nouveaux canons, des obus, et des avions… Les avions de chasse F16 longtemps espérés, pourraient, avant l’été, être opérationnels et devraient permettre de desserrer l’étau russe. « Les fameux F 16 permettraient de rééquilibrer le rapport de force dans les airs, et notamment permettre aux Ukrainiens d'avoir une meilleure maîtrise de leur espace aérien et éventuellement de frapper plus dans la profondeur, même au-delà des frontières de l'Ukraine ; mais déjà à l'intérieur des frontières de l'Ukraine ce serait déjà beaucoup. Ces avions permettront d'empêcher l'aviation russe d'appuyer ses troupes au sol, là où il n'y a pas les moyens sol-air. Car il y a des endroits où l'aviation russe arrive à passer et arrive à appuyer les troupes au sol, ce qui donne un avantage considérable côté russe. L’arrivée des F16 rééquilibrera le rapport de force. »

Après deux années de guerre de haute intensité, les pertes dans les deux camps sont effroyables, la question des effectifs devrait aussi se poser en 2024.

Des pertes effroyables

Selon des sources occidentales, 120.000 soldats russes auraient été tués, deux fois plus que du côté ukrainien. Dans ce conflit, l’équation humaine devient compliquée estime le général de Saint-Quentin: « J'ai le sentiment que les choses ne se posent pas de la même façon des deux côtés. D'abord parce qu'il y a une asymétrie. Le rapport de population c'est un Ukrainien pour trois Russes, donc on peut penser que le leur réservoir humain russe est trois fois plus important. Après, il y a une façon de se battre. Il est quand même beaucoup plus économe de la vie humaine côté ukrainien, même s'ils ont perdu du monde, c'est indéniable. Et de l'autre côté, côté russe, pour des gains qui finalement sont assez mineurs, ils consomment énormément de ressources matérielles mais aussi humaines. Je pense que, à un moment, ça finit par corroder le moral, le soutien de la population à la guerre. J'ai le sentiment que le président Zelenski fait très attention à ça. Du côté russe, on a un peu le sentiment que c'est un peu 'même pas mal' ! Mais je pense qu'à terme ça peut avoir des effets assez délétères. On parle quand même aujourd'hui de 350 000 soldats hors de combats (tués et blessés) côté russe. Est-ce qu'ils peuvent continuer longtemps à ce rythme-là ? Je n’en suis pas sûr. »

2024 sera donc une année d’attente, attente pour l’Ukraine d’une aide massive occidentale, 2024 sera aussi assurément une année d’âpres combats où tout peut arriver.