En Roumanie, le deuxième tour de l'élection présidentielle devait avoir lieu ce dimanche 9 décembre mais ce vendredi, la Cour constitutionnelle roumaine a annulé le premier tour en raison de soupçons d'ingérences russes par le biais de TikTok.
C’est un véritable coup de théâtre qui s’est opéré ce vendredi 6 décembre 2024. La Cour a décidé d’annuler la totalité du scrutin et de relancer le processus électoral. Une décision qui a surpris dans la mesure où elle avait d’abord validé les résultats du premier tour après un recomptage des voix. Mais des documents des services de renseignements ont étayé l’idée d’un rôle massif de TikTok dans la campagne, avec la Russie aux manettes. Face à Elena Lasconi, candidate centriste pro-européenne, ancienne journaliste, Calin Georgescu, candidat surgi de nulle part, a été appuyé par une campagne redoutablement efficace sur TikTok. Or, cet ancien haut fonctionnaire, qui s’est découvert une passion pour les vidéos complotistes pendant le covid, est un admirateur de Vladimir Poutine. Il appelle à l’arrêt de l’aide à l’Ukraine.
Surveillance du réseau TikTok
La Commission européenne a aussi annoncé jeudi qu'elle intensifiait sa surveillance de ce réseau après avoir reçu des informations sur une possible interférence de la Russie. Bien qu'elle ne se prononce pas sur une éventuelle violation de son règlement, elle demande à la plateforme chinoise de conserver les données qui permettront d'établir une possible manipulation. On trouve d'abord, chez le candidat Georgescu, la diffusion de fausses informations sur TikTok, comme lorsqu'il prétend que les enfants ukrainiens réfugiés en Roumanie reçoivent près de 750 euros d'allocations contre 50 euros pour « un enfant roumain du même âge ». C'est une de ses vidéos les plus vues qui l'ont rendu populaire. Il y a ensuite des choses étranges comme cette centaine d'influenceurs qui ont reconnu avoir été achetés quelques centaines d'euros pour inciter à aller voter en mettant un hashtag « Equilibreetverticalité ». Or ces mots dièse renvoyaient vers la campagne de Georgescu, candidat qui n'a ni parti ni, en principe, de dépenses de campagne.
Un candidat qui ne fait pas campagne non plus sur les médias traditionnels
C'est ce qui rend encore plus suspecte cette offensive éclair. Début novembre, le candidat n'atteignait pas 1% dans les sondages et il finit à près de 23% des voix au premier tour. C'est qu'entre-temps, selon le Conseil de défense roumain, il a bénéficié d'une « exposition massive » sur TikTok tout en n'étant pas étiqueté « candidat politique ». Les 25 000 comptes TikTok sont devenus extrêmement actifs en sa faveur et la mobilisation s'est organisée depuis Telegram. Des logos d'institution ont été aussi détournés pour faire croire à un soutien officiel. Si on ajoute des cyberattaques venues de Russie lors du premier tour, on a là tous les signaux de ce que les spécialistes appellent une « guerre hybride ».
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