La mer de Chine orientale, une zone sous haute tension entre le Japon et la Chine [1/2]


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Mar 01 2025 2 mins   56

On parle beaucoup de la tension très vive qui règne en mer de Chine méridionale, avec ces fréquentes escarmouches entre les navires des garde-côtes chinois et philippins. Mais plus à l'Est, en mer de Chine orientale, la situation s'est aussi beaucoup dégradée ces dernières années, en raison des intimidations et des provocations militaires à répétition de Pékin. À Okinawa, dans l'extrême Sud du Japon, l'armée est mobilisée comme jamais, et l'inquiétude des habitants grandit.

En 2024, des navires des garde-côtes chinois lourdement armés ont pénétré à 39 reprises dans les eaux territoriales japonaises pour s'approcher des Senkakus, îlots nippons que Pékin revendique. Et pendant 355 jours, ils ont harcelé les chalutiers japonais qui pêchaient aux alentours, leur ordonnant de quitter immédiatement « le territoire chinois ».

Au-delà, des navires de guerre chinois ont croisé en mer de Chine orientale à 68 reprises en 2024. C'est beaucoup plus que les années précédentes. Un avion de reconnaissance chinois a violé l'espace aérien du Japon, un événement inédit. Et dans la région, les exercices de l'armée de l'air chinoise se sont succédés, incluant parfois des bombardiers.

Dans les rues de Naha, la capitale d'Okinawa, l'inquiétude est palpable. « Un missile tiré à Pékin met moins de 10 minutes pour arriver ici. Le moment venu, on n'aura pas temps de se mettre à l'abri », redoute une habitante. Un autre confie qu'en cas de tir, dans la mesure où il n'y a « pas le moindre abri anti-missiles » aux alentours, il n'aurait pas d'autre choix : « Je resterais à la maison, me recroquevillerais sous la table du salon et prierais. » Un autre femme de Naha avoue ne plus regarder les journaux télévisés car « ils sont trop stressants ».

« Notre devoir est de protéger l'ensemble de notre territoire et d'assurer la sécurité de tous les Japonais »

Désormais, en mer de Chine orientale, bon nombre d'îles japonaises sont hérissées de batteries de défense anti-missiles. Dans plusieurs bases militaires, des missiles balistiques de longue portée sont entreposés. Et les garnisons stationnées dans la région ont vu leurs effectifs considérablement augmenter. Mais cette mobilisation militaire ne fait pas l'unanimité. Certains jugent qu'elle fait courir des risques aux habitants.

« Ces bases militaires censées nous protéger. En fait, elles nous mettent en danger, car si la guerre éclate, les localités où elles sont implantées seront la cible numéro 1 de l'ennemi. Rien que cette idée me fait frémir », déclare l'une d'elle. Un autre habitant abonde : « On le voit en Ukraine depuis trois ans : les missiles russes s'abattent en priorité sur les villes où se trouvent des garnisons ou des dépôts de munitions. Ce sont des abris souterrains qu'il nous faudrait pour être bien protégés, pas des bases militaires. »

Comment l'armée prend-elle ces critiques ? Le major général Nakashima, numéro 2 de la zone de Défense du sud-ouest, répond : « Notre devoir, c'est de protéger l'ensemble de notre territoire, et donc d'assurer la sécurité de tous les Japonais. Mais dans notre pays, le sentiment antimilitariste n'est pas marginal depuis la fin de la Seconde guerre mondiale. Nous en prenons acte avec humilité et allons donc poursuivre notre travail de persuasion et de conviction afin d'obtenir la compréhension et la coopération de la population. »

L'enjeu est aussi de rassurer, car à en croire les sondages, huit Japonais sur dix jugent que l'environnement sécuritaire de la région s'est dégradé ces dernières années. Et plus d'un sur deux se dit persuadé qu'un jour ou l'autre, la Chine finira par attaquer Taïwan, qui n'est qu'à une centaine de kilomètres de plusieurs îles japonaises.

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