Le maître de la littérature belge nous a quittés ce dimanche ; Pierre Mertens avait 85 ans. Il venait de publier son dernier roman, 'Paysage sans Véronique', paru aux Impressions Nouvelles, qui était en gestation en lui depuis le décès de Véronique Pierroton dans une chambre d’hôtel à Ostende. Il ne croyait pas à la thèse du suicide de son amie. Je suis soulagée qu’il ait pu tenir son roman en mains avant de fermer les yeux pour de bon.
Né le 9 octobre 1939 à Berchem-Sainte-Agathe, l’écrivain était docteur en Droit, spécialiste du Droit international et directeur du Centre de Sociologie de la Littérature à l’Université libre de Bruxelles. Juriste engagé, il s’exprimait régulièrement sur la scène publique et n’hésitait pas à mêler fiction et témoignages historiques dans son œuvre, comme dans sa splendide nouvelle 'L’ami de mon amie'. Né de père résistant et de mère juive, il aura été un 'enfant caché' durant la Seconde Guerre mondiale et n’en parlera jamais avant ses septante ans. Jean-Pierre Orban évoque cette page de son histoire dans 'Le siècle pour mémoire', une biographie magistrale et passionnante, publiée en 2018, qui retrace sa vie et son œuvre. Prix Médicis pour 'Les Eblouissements' en 1987, Prix Rossel pour son premier roman 'L’Inde ou l’Amérique', il était membre de l’Académie royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique et nommé chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres de la République française. Voici pour les honneurs. C’était surtout un homme drôle, d’une intelligence verbale prodigieuse, ouvert aux autres et d’une remarquable écoute des écrivains. J’ai eu la chance de le recevoir plusieurs fois dans mes émissions. Il parlait avec bonheur de ses écrivains fétiches, Kafka, le premier, l’annonciateur pour lui de la littérature dans sa vie, Pasolini dont il imitait la voix d’étoupe, Milan Kundera qui lui fut proche. Il détaillait aussi les alliances entre la médecine et la littérature et se faisait alors le chantre de Tchekhov et de son humanité à toute épreuve. Il signait un splendide texte sur Alban Berg, qui mourut d’une piqûre de guêpe à 50 ans. Car la musique était sa seconde passion et sa rencontre avec Arvo Pärt lui fut un émerveillement. Avec 'Une paix royale', il passa, comme il le disait lui-même, de la chronique littéraire à la chronique judicaire. Œuvre majeure où il replongea dans le bain de l’enfance et du vélo, la petite reine qui lui fit croiser la route du roi Baudouin dont la voiture accrocha le vélo du garçon. Signe des dieux et des déesses, il donna dans 'Une paix royale' un portrait émouvant du roi Léopold et d’une Belgique menacée par les eaux d’un grand chambardement maritime. La veuve de Léopold n’apprécia pas certains passages. Il faut lire ou relire cette oeuvre flamboyante et baroque où l’écriture de Pierre Mertens est à son acmé. Pierre Mertens rend sa plume et nul ne peut s’en saisir. Il nous reste ses romans comme héritage et sa voix enjouée dans nos échanges passés.
Photo : Discours de Pierre Mertens au Prix Rossel, 2012 - BELGA IMAGE/ KRISTOF VAN ACCOM
Né le 9 octobre 1939 à Berchem-Sainte-Agathe, l’écrivain était docteur en Droit, spécialiste du Droit international et directeur du Centre de Sociologie de la Littérature à l’Université libre de Bruxelles. Juriste engagé, il s’exprimait régulièrement sur la scène publique et n’hésitait pas à mêler fiction et témoignages historiques dans son œuvre, comme dans sa splendide nouvelle 'L’ami de mon amie'. Né de père résistant et de mère juive, il aura été un 'enfant caché' durant la Seconde Guerre mondiale et n’en parlera jamais avant ses septante ans. Jean-Pierre Orban évoque cette page de son histoire dans 'Le siècle pour mémoire', une biographie magistrale et passionnante, publiée en 2018, qui retrace sa vie et son œuvre. Prix Médicis pour 'Les Eblouissements' en 1987, Prix Rossel pour son premier roman 'L’Inde ou l’Amérique', il était membre de l’Académie royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique et nommé chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres de la République française. Voici pour les honneurs. C’était surtout un homme drôle, d’une intelligence verbale prodigieuse, ouvert aux autres et d’une remarquable écoute des écrivains. J’ai eu la chance de le recevoir plusieurs fois dans mes émissions. Il parlait avec bonheur de ses écrivains fétiches, Kafka, le premier, l’annonciateur pour lui de la littérature dans sa vie, Pasolini dont il imitait la voix d’étoupe, Milan Kundera qui lui fut proche. Il détaillait aussi les alliances entre la médecine et la littérature et se faisait alors le chantre de Tchekhov et de son humanité à toute épreuve. Il signait un splendide texte sur Alban Berg, qui mourut d’une piqûre de guêpe à 50 ans. Car la musique était sa seconde passion et sa rencontre avec Arvo Pärt lui fut un émerveillement. Avec 'Une paix royale', il passa, comme il le disait lui-même, de la chronique littéraire à la chronique judicaire. Œuvre majeure où il replongea dans le bain de l’enfance et du vélo, la petite reine qui lui fit croiser la route du roi Baudouin dont la voiture accrocha le vélo du garçon. Signe des dieux et des déesses, il donna dans 'Une paix royale' un portrait émouvant du roi Léopold et d’une Belgique menacée par les eaux d’un grand chambardement maritime. La veuve de Léopold n’apprécia pas certains passages. Il faut lire ou relire cette oeuvre flamboyante et baroque où l’écriture de Pierre Mertens est à son acmé. Pierre Mertens rend sa plume et nul ne peut s’en saisir. Il nous reste ses romans comme héritage et sa voix enjouée dans nos échanges passés.
Photo : Discours de Pierre Mertens au Prix Rossel, 2012 - BELGA IMAGE/ KRISTOF VAN ACCOM
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