Jan 23 2025 54 mins 1
Présentation : Cindya Izzarelli
Invité.es :
Christophe Sermet pour la pièce "Hamlet"
C’est l’histoire d’un jeune homme dont on attend en retour de l’assassinat présumé de son père - le roi - , l’inéluctable : la vengeance. Incapable d’exercer la violence, Hamlet recourt aux mots, au langage et au théâtre pour la retarder. D’abord, en mettant en scène la pièce qui relate le fratricide afin de piéger la conscience du frère usurpateur. Puis, en jouant lui-même la folie pour mener l’enquête undercover, aux allures de triller politique dans le huis-clos du palais ; enquête qui se révèle être aussi l’exploration de soi, et de sa capacité (ou non) à exercer la violence. Alors que la pièce hésite entre la comédie et la tragédie, Hamlet tue par inadvertance burlesque le Premier ministre, le père de sa fiancée Ophélie. La mécanique tragique est lancée sans que le pouvoir des mots (ou théâtre) n’y puisse rien changer, ni aux pulsions humaines, ni au bain de sang final.
Agnès Guignard pour la pièce "Pieds nus (votke bobik)"
Le mot histoire est un peu prétentieux. Rien n’est romantique dans l’histoire de ces gens ballottés en équilibre entre la misère, les rêves, l’amour simple et sans condition pour leurs enfants, et le travail qui leur rendait l’honneur. Voilà quelques petits grains que j’ai conservés précieusement dans ma main, intacts, et que je vais égrener avec plaisir. Je n’ai rien inventé. Anna Et pourtant il s’agit bien d’une histoire, d’histoires, d’Histoire. Le jour où Agnès Guignard reçoit des mains de sa mère Anna un cahier d’école dans lequel celle-ci a retranscrit le récit de vie d’Hagop, le grand-père d’Agnès, commence pour l’actrice et autrice de Pieds nus (votke bobik), le trajet du saumon… Celui qui remonte la rivière où il est né. Enfant, elle a connu son grand-père, cette présence silencieuse au sourire énigmatique, qui ne parlait qu’en arménien, à sa fille. Le cahier à l’écriture brute et sans commentaire est donc celui des confidences d’Hagop vues depuis le prisme d’Anna. D’abord habitée par la question de la vérité, notamment en visitant les Archives du Territoire de Belfort dans l’est de la France où Hagop a immigré en 1923, Agnès est confrontée à ce que la vérité peut comporter de parcellaire et de fragile, et s’approprie aujourd’hui ce récit de transmission en le portant dans son propre langage, celui du théâtre. Diyarbakir, Mardine, Mossoul, Alep, Bagdad, Beyrouth, Marseille, Belfort … Histoire de ce qu’a traversé ce réfugié arménien fuyant le génocide de 1915-1916. Histoire d’une survivance, d’une échappée et d’une mémoire qui ne veut pas mourir. Histoire aussi en filigrane du chemin partagé avec humour et joie de vivre entre une mère et sa fille. Le spectacle commence d’ailleurs au cimetière, devant la tombe d’Hagop, où la voix d’Anna enregistrée par Agnès entre en dialogue avec celle de sa fille qui est face à nous. Et c’est aussi au creux d’un dialogue entre le singulier et l’universel, le passé et le présent, le certain et l’incertain, le réel et le fictif, que se tisse la question de la présence. Celle de la voix de la mère aujourd’hui disparue, celle du fantôme au parcours intime adossé à l’Histoire, et celle du corps en jeu qui nous offre sa vérité vibrante.
Chronique : Fanny Cuisset
Invité.es :
Christophe Sermet pour la pièce "Hamlet"
C’est l’histoire d’un jeune homme dont on attend en retour de l’assassinat présumé de son père - le roi - , l’inéluctable : la vengeance. Incapable d’exercer la violence, Hamlet recourt aux mots, au langage et au théâtre pour la retarder. D’abord, en mettant en scène la pièce qui relate le fratricide afin de piéger la conscience du frère usurpateur. Puis, en jouant lui-même la folie pour mener l’enquête undercover, aux allures de triller politique dans le huis-clos du palais ; enquête qui se révèle être aussi l’exploration de soi, et de sa capacité (ou non) à exercer la violence. Alors que la pièce hésite entre la comédie et la tragédie, Hamlet tue par inadvertance burlesque le Premier ministre, le père de sa fiancée Ophélie. La mécanique tragique est lancée sans que le pouvoir des mots (ou théâtre) n’y puisse rien changer, ni aux pulsions humaines, ni au bain de sang final.
Agnès Guignard pour la pièce "Pieds nus (votke bobik)"
Le mot histoire est un peu prétentieux. Rien n’est romantique dans l’histoire de ces gens ballottés en équilibre entre la misère, les rêves, l’amour simple et sans condition pour leurs enfants, et le travail qui leur rendait l’honneur. Voilà quelques petits grains que j’ai conservés précieusement dans ma main, intacts, et que je vais égrener avec plaisir. Je n’ai rien inventé. Anna Et pourtant il s’agit bien d’une histoire, d’histoires, d’Histoire. Le jour où Agnès Guignard reçoit des mains de sa mère Anna un cahier d’école dans lequel celle-ci a retranscrit le récit de vie d’Hagop, le grand-père d’Agnès, commence pour l’actrice et autrice de Pieds nus (votke bobik), le trajet du saumon… Celui qui remonte la rivière où il est né. Enfant, elle a connu son grand-père, cette présence silencieuse au sourire énigmatique, qui ne parlait qu’en arménien, à sa fille. Le cahier à l’écriture brute et sans commentaire est donc celui des confidences d’Hagop vues depuis le prisme d’Anna. D’abord habitée par la question de la vérité, notamment en visitant les Archives du Territoire de Belfort dans l’est de la France où Hagop a immigré en 1923, Agnès est confrontée à ce que la vérité peut comporter de parcellaire et de fragile, et s’approprie aujourd’hui ce récit de transmission en le portant dans son propre langage, celui du théâtre. Diyarbakir, Mardine, Mossoul, Alep, Bagdad, Beyrouth, Marseille, Belfort … Histoire de ce qu’a traversé ce réfugié arménien fuyant le génocide de 1915-1916. Histoire d’une survivance, d’une échappée et d’une mémoire qui ne veut pas mourir. Histoire aussi en filigrane du chemin partagé avec humour et joie de vivre entre une mère et sa fille. Le spectacle commence d’ailleurs au cimetière, devant la tombe d’Hagop, où la voix d’Anna enregistrée par Agnès entre en dialogue avec celle de sa fille qui est face à nous. Et c’est aussi au creux d’un dialogue entre le singulier et l’universel, le passé et le présent, le certain et l’incertain, le réel et le fictif, que se tisse la question de la présence. Celle de la voix de la mère aujourd’hui disparue, celle du fantôme au parcours intime adossé à l’Histoire, et celle du corps en jeu qui nous offre sa vérité vibrante.
Chronique : Fanny Cuisset
Merci pour votre écoute
Kiosk c'est également en direct tous les samedi de 14h à 15h sur www.rtbf.be/lapremiere
Retrouvez tous les épisodes de Kiosk sur notre plateforme Auvio.be :
https://auvio.rtbf.be/emission/ 25519
Et si vous avez apprécié ce podcast, n'hésitez pas à nous donner des étoiles ou des commentaires, cela nous aide à le faire connaître plus largement.