Mar 01 2025 3 mins
(c) Doug Mills/The New-York Times
Il y a cette scène, pas vraiment inhabituelle mais qu'on voit ordinairement dans les films de mafieux (ou dans les planches de Tintin chez les Soviets), cette scène filmée lors de la première réunion du cabinet Trump (et pourquoi diable y a-t-il toujours des caméras ?) durant laquelle, Elon Musk ayant exposé le sens et les objectifs de sa para-administration DOGE, Donald Trump reprend la parole et lance à ses ministres, goguenard :
“Is anybody unhappy with Elon? If you are, we’ll throw him out of here. Is anybody unhappy?”
A cette question, les membres du cabinet, médusés, rient (mais plus jaune tu meurs) et certains commençant à applaudir, les autres suivent, s'esclaffant bruyamment (et plus grassement tu meurs) de cette bonne, si bonne blague.
Je me demande ce que eux, elles et eux, plutôt, pouvaient bien ressentir, à ce moment là : du soulagement d'être, provisoirement du moins, du bon côté du manche ? La crainte, devant cette menace même pas voilée, de ne l'être pas toujours (du bon côté) ? La honte de se montrer si serviles et de le faire, en plus sous l'objectif des caméras et la membrane des microphones ?
Et l'interrogateur, le puissant, l'homme blond jouant les Parques, quelles idées traversaient son esprit, quelle jouissance éprouvait-il tandis qu'il souriait et tournait la tête d'un côté et de l'autre pour vérifier comment chacun prenait la chose ? Était-il dupe un seul instant de la fausseté des rires ? Croyait-il vraiment être drôle comme un comique dans un stand-up ? Ou ressentait-il le plaisir sadique du maître qui voit ses esclaves trembler à la vue de son fouet ? Ou encore ce plaisir un peu sophistiqué, ce plaisir sadique au carré, du maître qui menace, qui fait peur, qui humilie, et qui jouit du mépris qu'il éprouve pour le rire gras, les applaudissements, la servilité de ces prétendus puissants qu'il tient sous sa botte et qu'il a plaisir à voir se liquéfier et à perdre toute dignité pour avoir une chance de durer ?
Qu'ils sont sombres, sombres, amers et désespérants, les gouffres qui s'ouvrent parfois dans les esprits des hommes (et peut-être des femmes, hélas) !