Pourquoi recycle-t-on si peu de plastique?


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Nov 27 2024 3 mins   3

Depuis lundi se tiennent à Busan, en Corée du Sud, des négociations en vue de l’adoption d’un traité international contre la pollution plastique. Si les moyens à mettre en œuvre pour lutter contre sont loin de faire l’unanimité, le constat est en revanche partagé : ça déborde. Le monde produit en effet 460 millions de tonnes de plastique chaque année, un chiffre qui devrait plus que doubler d’ici 2050, alors que l’énorme majorité des produits ne sont pas traités quand ils arrivent en fin de vie.

Sur 100 kilos de produits plastiques, 79 finiront leur vie dans la nature, 12 seront incinérés, et seuls 9 seront recyclés. « Recyclés » est d’ailleurs un bien grand mot, car en réalité, pour le plastique, « sous-cyclés » serait plus juste. En effet, dans l’énorme majorité des cas, les techniques utilisées entraînent une perte de valeur du produit. Une fois traitée, une bouteille d’eau en plastique ne donnera pas une autre bouteille, mais servira plutôt à obtenir des fibres de polyester de moins bonne qualité, qui seront utilisées dans l’industrie textile.

Au-delà de cette dégradation, le recyclage du plastique est un processus très compliqué. Il y a plusieurs milliers de plastiques différents, avec des techniques de traitement propres à chacun. Cela a notamment de lourdes conséquences sur la phase de tri des déchets. Une bouteille d’eau est généralement faite en PET, un des plastiques les plus courants ; elle ne sera pourtant pas recyclable en même temps qu’une autre en PET, mais de couleur verte, les processus sont différents.

Faire mieux que 9 %

À cette complexité de tri s’ajoute celle des techniques utilisées pour le traitement : de nombreux plastiques contiennent des additifs chimiques. Ils permettent d’obtenir des produits plus ou moins imperméables, flexibles, colorés... Ces additifs peuvent cependant être nocifs pour la santé, notamment celle des opérateurs de traitement. Cela rend l’opération d’autant plus compliquée, voire parfois impossible. Enfin, de nombreux plastiques sont contaminés : du film alimentaire couvert de sauce tomate à l’emballage sur lequel la colle de l’étiquette ne veut pas partir, les contaminations sont multiples, ne peuvent pas toujours être lavées, et peuvent empêcher le recyclage de lots entiers. Ils finissent alors à l’incinérateur.

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En dépit de ces difficultés, il y a un consensus pour parvenir à faire mieux que les 9 % de plastique recyclés actuels. Cette ambition se heurte cependant à plusieurs difficultés. Il y a tout d’abord les enjeux financiers pour généraliser le recyclage dans le monde. Cela passe par la mise en place de filières de collecte, de tri et de traitement. Il y a ensuite d’autres leviers sur lesquels les producteurs ont la main. Les processus de traitement peuvent ainsi être simplifiés en harmonisant et en standardisant les plastiques qui sortent des usines. Le recours aux additifs chimiques peut être limité, tout en étant transparents sur leur nature, trop souvent gardée secrète.

Un enjeu des négociations de Busan

Ces leviers sont discutés alors que les représentants de près de 180 pays sont réunis en Corée du Sud pour mettre au point le traité limitant la pollution plastique. L’enjeu est d’autant plus important pour les pays producteurs de pétrole, qui voient dans cette matière un débouché de plus en plus central pour leurs hydrocarbures. Opposés à toute baisse de la production pour faire face à la pollution toujours plus grande, ils mettent en avant le recyclage comme solution à tous les problèmes.

Face à eux, une majorité des pays sont réunis dans une coalition dite de « haute ambition ». Ils font le constat inverse : étant donné le faible niveau de recyclage, et qu’un objectif de 100 % est irréaliste, le niveau de déchet augmentera mécaniquement. Il faut donc mettre un plafond à la production. L’objectif mis en avant par certains pays est de la réduire de 40 % d’ici 2040 par rapport au niveau de 2025. Cependant, à mi-parcours des négociations, les discussions avancent très lentement, laissant présager une fin de négociation « compliquée » selon un diplomate européen, cité par l’AFP.

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